Martigny, le 10 janvier 2022 -- UBCOM, agence de conseils stratégiques et protection du secret, poursuit son engagement dans la défense d’une souveraineté numérique européenne avec la réalisation d’un sondage en Suisse portant sur la surveillance numérique, la protection des données, des individus et le libre arbitre.
Ce document présente les résultats du sondage et permet de constater un état de conscience des citoyens Suisses concernant leurs données personnelles en temps de pandémie. L’ensemble de l’étude offre à la fois un bilan et une prospective de la société numérique post-Covid.
Sonderfall : L’exception suisse à protéger
39% des Suisses font confiance à la Confédération pour protéger leurs données. Un chiffre faible qui met en garde l’équilibre démocratique qui est tributaire de l’adhésion des citoyens à l’offre numérique du moment et de la confiance de la population envers l’acteur politique. Plus surprenant, seulement 5% des Suisses font confiance aux organismes financiers pour traiter leurs données. Ceci détonne avec la culture du secret ainsi qu’avec la culture de la protection du secret bancaire pourtant intrinsèque à la culture helvétique.
La neutralité est une valeur suisse qui permet aux différentes communautés allemande, italienne et française de former la communauté helvétique sans conflit. L’idée qu’il y ait une crise de confiance au sein d’institutions financières nationales, censées incarner cette neutralité, pose question.
Frans Imbert-Vier, CEO d’UBCOM invoque une crise de confiance : « les derniers scandales bancaires dont l’affaire UBS et celle du Credit Suisse ont porté un sacré coup à la moralité de ces établissements et démontrent l’anéantissement du crédit de confiance du citoyen à l’égard des géants de la finance ».
Ce phénomène peut s’expliquer par plusieurs facteurs :
- L’explosion de scandales financiers autour du Crédit Suisse (Greensill, Archegos, Filatures, Mozambique) ainsi que l’implication suisse dans les Panama et Pandora papers sont une possible explication à cette baisse de confiance envers les institutions financières.
- Le retrait du secret bancaire en 2009 sous la pression des américains sur tous les sous-traitants étrangers des banques a marqué un tournant dans l’histoire helvétique.
- Les voisins français et allemands mettent en place une campagne soutenue de protection de la donnée du citoyen, notamment grâce à l’adoption européenne du RGPD en 2018, tandis que la Suisse reste très libérale sur la protection de la donnée malgré la révision de la Loi fédérale sur la protection des données (LPD).
La Suisse présente également une envie de préserver son intégrité vis-à-vis des acteurs extérieurs à la Confédération en affirmant sa méfiance vis-à-vis des GAFAM avec seulement 6% des sondés qui leurs font confiance.
Manipulation des données personnelles
Les Suisses accordent une grande sensibilité à leurs communications privées (71%) et à leurs coordonnées (69%), et ce devant les données de santé (60%). Tandis que le RPGD impose dans l’Union Européenne, un objectif précis pour le traitement de la donnée avant sa collecte, la LPD prévoit de la même manière, qu’en Suisse la donnée soit traitée dans l’unique but pour lequel elle a été collectée.
En 2021, tout type d’activité numérique (téléchargement d’applications, achat de billets de transports, paiement en ligne, etc.) implique systématiquement l’enregistrement des coordonnées. Une pratique instinctive tant elle s’est rationalisée au fil du temps. Cependant, les effets de bord de ce partage de données sont eux, directement visibles puisqu’ils se matérialisent par des appels télémarketing, des spams, ou des pop-ups de plus en plus ciblés, et sans lien direct entre le vendeur et la cible. La vente de la donnée s’appréhende alors plus rapidement dans la mesure où chaque individu sait à peu près à quels organismes il a autorisé l’envoi de « notifications », et ceux auxquels il n’a jamais délivré directement ses coordonnées.
Ces résultats témoignent une nouvelle fois de la clairvoyance des Suisses liée à une saturation des sollicitations commerciales non consenties, via des canaux personnels. En effet 40% des utilisateurs d’internet âgés de 16 à 64 ans se disent préoccupés du traitement de leurs données personnelles selon le Digital Report 2021 mené par le collectif We Are Social.
Cyber-harcèlement : un enjeu de santé publique
65% de la population affirme que la Confédération néglige la prévention du danger contre le cyberharcèlement. Un résultat qui montre que les Suisses sont avertis des dangers relatifs au cyberespace et souhaite des politiques publiques fortes sur ce sujet et ce malgré des efforts significatifs dans les cantons Romands et celui de Zurich dans la mise en place de politique de prévention orchestrée par les polices cantonales.
En Suisse, 1 jeune sur 4 a déjà été victime de cyber-harcèlement (agression répétée via des supports numériques tels que la diffusion d'images à caractère pornographique, l'usurpation d'identité, la violation de données bancaires, la menace, la diffamation...) selon une étude menée par Swisscom avec l'Université des sciences appliquées de Zurich en 2020. Plus de la moitié des jeunes filles disent notamment avoir déjà été contactées par un inconnu avec des intentions indésirables sur les réseaux sociaux.
Le pays est directement concerné par cet enjeu de par le fort taux de pénétration du numérique dans les pratiques quotidiennes. La Suisse se trouve dans une moyenne haute en termes de présence sur les réseaux sociaux avec une participation de 81,8% de sa population contre une moyenne mondiale de 53,6% (selon le Digital Report 2021 mené par le collectif We Are Social).
Autrement dit, plus de 3 Suisses sur 5 considèrent donc que l’État néglige un aspect de leur sécurité. Si les politiques publiques ont cherché à sécuriser la rue pour les jeunes auparavant, il y a désormais un nouvel espace, numérique cette fois-ci, où les plus jeunes et adolescents doivent être sensibilisés et protégés, au même titre que dans l’espace publique.
Selon Frans Imbert-Vier “Cette prise de conscience révèle une vraie maturité des citoyens quant aux risques induits par l’usage des réseaux sociaux “.
A noter que le cyber-harcèlement peut se caractériser par :
- La fuite par la désactivation d’un réseau sociale d’une personnalité parce que cette dernière est menacée de mort à répétition par des « trolls » (individu qui vise à générer une polémique, le plus souvent haineuse) ;
- La possibilité de voir des individus cibler une population ou une communauté pour la discréditer, la stigmatiser, ou l’intimider ;
- Ou encore la possibilité de commander en ligne, le viol d’un enfant, sur des plateformes non référencées de commerce de pédo-criminalité.
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La protection du secret en inadéquation avec la surveillance numérique
85 % des Suisses se savent observés à travers leurs pratiques numériques à des fins de publicité et de renseignements. Une réponse qui fait échos au faible taux de confiance envers les GAFAM (6%) représenté à la question 1 et qui démontre le refus d’un entrisme extérieur dans les valeurs de neutralité suisse. Car si la Suisse est un pays en mosaïque culturelle, forte de ses 26 cantons, elle est entourée de grandes puissances historiquement en conflits. Son exception et sa neutralité l’ont toujours protégée de possibles divisions liées à sa pluralité culturelle. Son écart vis-à-vis de l’étranger est donc à protéger si elle souhaite conserver l’intégrité de sa démocratie directe.
D’ailleurs, « dans les mythes fondateurs helvétiques, La soupe au lait de Kappel (peinture de Albert Anker 1869) raconte que lors d’une guerre de religion, les soldats des deux camps auraient partagé une soupe avant le déclenchement du conflit » précise Clémentine Balayer, analyste en intelligence économique chez UBCOM. Une légende qui symbolise cette neutralité non figée, mais médiatrice.
Ce chiffre démontre une conscience, sinon indirecte, d’une possible perte de souveraineté et d’une ingérence étrangère par les canaux numériques et notamment via les géants du numérique. Il s’inscrit en cohérence avec la votation populaire demandée pour reconsidérer le choix d’Alibaba pour traiter et conserver la donnée fédérale.
Suisse et acteurs privés : le démenti
59% des Suisses considèrent que l’acteur privé n’est pas digne de confiance, ce qui dément les préjugés selon lesquels la Suisse est un haut lieu de la privatisation. Répondant une seconde fois à la question du traitement des données personnelles (cf. question UB1), les Suisses affirment leur scepticisme vis-à-vis des organismes privés.
Pour comprendre cette aversion de plus en plus grande pour le secteur privé de la part de la population suisse, on peut notamment relever trois facteurs :
- Le classement du pays parmi les premiers dans l’indice de corruption par l’ONG Transparency International Suisse (Lutte contre la corruption : la Suisse encore loin du sans faute, communiqué de presse, 18/01/21). D’abord à cause des scandales autour du secteur sportif, de la protection des lanceurs d’alertes et du blanchiment d’argent.
- La faiblesse des procédures de pénalisation par les ministères publiques de la Confédération et des cantons (Lutte contre la corruption : la Suisse encore loin du sans faute, communiqué de presse, Transparency International Suisse, 18/01/21).
- Les récentes attaques cybers contre des marques fortes comme Comparis, DBS ou encore les Syndics de Montreux et Rolle et plus de 10'000 attaques selon la RTS en 2021 contre le secteur privé.
Ce qui peut expliquer la préférence pour les organismes publics ou pour la Confédération, pourrait être la forte identité publique évoquée plus haut (neutralité, démocratie directe …) ou par le fait que le secteur public soit le premier employeur.
Selon Frans Imbert-Vier, « le défi que souligne ce résultat, à la fois en termes de soft power et de cohésion nationale pour la Suisse, est celui de la distinction entre « corruption des secteurs privés » d’une part et « volonté et confiance envers la Confédération » d’autre part. Néanmoins, la confusion de réputation qui perdure entre les deux secteurs met en lumière de possibles relations et conflits d’intérêts entre acteurs privés et publics dans les institutions du pays, notamment dans le financement de la vie politique ».
L’exemplaire démocratie suisse en équilibre
41 % des Suisses considèrent incohérent le choix de sociétés étrangères dans des secteurs stratégiques de l’économie helvétique.
En juin 2021, la Confédération décide de s'approvisionner en services cloud pour stocker une partie des données de l'administration fédérale. Les entreprises américaines Amazon, Microsoft, IBM et Oracle sont retenues aux côtés du chinois Alibaba pour fournir ce service. Au même titre qu'elle décide de renouveler sa défense aérienne en s'appuyant sur le F-35 américain.
La Confédération ne semble ni défendre l'industrie numérique nationale ni l'industrie européenne par ces choix extracontinentaux. Malgré les incidents bancaires, ou l’affaire Crypto AG, la Suisse brille toujours par sa neutralité qui pourrait être mise à mal par un système numérique porté par les Américains ou les Chinois, car ces derniers ont bien une démarche hostile et néfaste vis-à-vis de la stabilité sociale et de la préservation du librearbitre du citoyen.
Si les derniers choix stratégiques de la Confédération n’inclut pas les données stratégiques fédérales, il n’en demeure pas moins que l’usage intense d’une technologie extra continentale issue d’un Empire engendre de facto un processus de dépendance nuisible à terme pour le système politique de la nation.
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À PROPOS D’UBCOM :
UBCOM est une agence de conseils stratégiques et de protection du secret créée en 2014. Ubcom agit en prévention du risque cyber et portège l’asset informationnel tactique et stratégique de l’économie. Nous conseillons et proposons des solutions concrètes en cyber-défense, cyber-sécurité, en protection du secret et souveraineté numérique pour protéger les intérêts économiques des acteurs européens sur le marché mondial contre l’intelligence économique et l’espionnage industriel. L’agence opère depuis la France, le Luxembourg et la Suisse. Elle assure également la protection politique d’une information en maitrisant toutes les régulations et lois locales afin de protéger le détenteur et la propriété intellectuelle. Référent disruptif sur le marché, Ubcom produit des stratégies de défense en prenant part au débat politique relevant de la souveraineté numérique jusqu’au libre arbitre citoyen et entrepreneurial.
MÉTHODOLOGIE :
L’enquête a été réalisée sur 1000 personnes représentatives de la population nationale suisse âgée de 18 ans et plus. Le sondage a été effectué en ligne, sur le panel propriétaire YouGov, du 7 au 16 décembre 2021, selon la méthode des quotas en 3 langues.
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UBCOM